🇨🇵 Les vœux du RAID à Bièvres (Essone), une joie de se rassembler autour de son patron, Jean-Baptiste DULION. Une année 2022 forte en actualités pour la Police nationale et qui se prépare à la sécurité de la Coupe du monde de Rugby, et des Jeux Olympiques 2024 !
Un remerciement à M.Frédéric VEAUX, Directeur général de la Police nationale pour son accueil. Sonia Fibleuil, porte-parole de la Police nationale pour nos échanges. Tous mes vœux aux policiers du RAID rassemblés (Thierry SABOT …), aux policiers. Au patron du GIGN Ghislain RETY présent car la sécurité au ministère de l’Intérieur fédère la Police nationale et la Gendarmerie Nationale.
L’occasion de m’entretenir avec Jean-Michel FAUVERGUE, chef du RAID de 2013 à 2017, en période des attentats de 2015 alors que je venais de terminer et apprécier la lecture de son dernier livre « Les hommes en noir » édité chez PLON.
LE PREAMBULE A L’INTERVIEW DE JEAN-MICHEL FAUVERGUE
- Présentation de l’auteur
Jean-Michel Fauvergue est l’auteur du roman « Les hommes en noir » qui vient de paraître chez Plon, ancien commissaire Général de police et ex homme politique français.
Il entre dans la Police nationale en 1978 au grade d’Officier de Paix, après avoir effectué son service militaire au 35e régiment d’artillerie parachutiste (35e RAP).
Il devient commissaire de police en 1986 et commandera plusieurs services opérationnels de la police, en France métropolitaine et en outre-mer avant de s’investir dans la coopération policière au Mali et au Gabon. Il deviendra patron du RAID de 2013 à mars 2017, et sera en première ligne lors des attentats de 2015 (Hyper-Casher, Bataclan, Saint-Denis) et de 2016 (Magnanville, Saint Etienne du Rouvray).
A la fin de sa carrière au service de l’État, il est investi par le mouvement En marche ! pour les élections législatives de 2017 dans la 8ème circonscription de Seine-et-Marne dont il est élu le 18 juin 2017 jusqu’en juin 2022.
En 2017, Jean-Michel Fauvergue publie un livre sur son expérience à la tête de l’unité d’élite du RAID : « Patron du RAID : Face aux attentats terroristes ». Il est également l’auteur de plusieurs ouvrages dont : « Comment Manager une unité d’élite » (2017), « La Sécurité des français » (2019), « GIGN-RAID deux patrons face aux nouvelles menaces » (2020).
En cette nouvelle année, il publie son premier Roman, « Les Hommes en noir », chez Plon.
- Présentation du roman
Gaby a enchainé les missions délicates et les succès à la tête de son unité anti-terroriste. Elu député, puis nommé conseiller spécial du ministre de l’Intérieur, il poursuit son combat contre le terrorisme par des moyens politiques.
Mais dans l’ombre le danger guette : il a pour nom Wahid, il veut venger ses « frères » tombés sous les balles de Gaby et de ses hommes. Il tisse patiemment sa toile, y mettant toute sa determination et sa ruse.
Leur face-à-face fera trembler les plus hauts sommets de l’Etat, avant un dénouement inattendu….
L’INTERVIEW DE JEAN-MICHEL FAUVERGUE PAR MISS K
Après vos témoignages sur les événements de 2015 et 2016 dans le livre « Patron du RAID : face aux attentats terroristes » (Mareuil Editions), pourquoi y consacrer maintenant un roman?
Tout d’abord je tiens à préciser que je ne consacre pas ce premier roman aux événements de 2015 et 2016, je m’appuie sur cette terrible réalité qui est bien présente en début de récit, pour développer une histoire à multiples rebondissements. De la même manière je me sers aussi de mon expérience politique par introduire des incertitudes en jouant sur fiction et réalité.
J’avais déjà témoigné « à chaud » dans « Patron du Raid » de toutes les interventions terribles des années 2015 et 2016 que j’avais vécu directement à la tête de cette magnifique unité d’intervention. Mais les récits de ce type ne permettent pas de s’éloigner de la réalité du moment, ils se doivent d’être clairs, explicatifs et factuels.
La dimension romanesque, surtout quand elle se nourrit des traumatismes qui ont impacté tout un pays, permet de s’exprimer dans un imaginaire qui laisse libre court, par l’intermédiaire des personnages et des situations revisitées, à des interprétations, et des vérités différentes et variées. C’est dans ces moments que tout est possible et que le récit permet de délivrer des messages et que les sentiments s’expriment dans leurs complexités.
Et puis, je voulais aussi en partant de mon implication personnelle dans ces drames, raconter une histoire avec de multiples rebondissements, on est dans un roman noir ou entre terrorisme et politique, le lecteur est transporté au plus profond des coeurs et des âmes dans des complots successifs qui feront vaciller les plus hauts sommets de l’Etat.
Vous définissez vous même votre livre de « roman noir » la plupart des situations vécues sont dramatiques mais vos personnages sont-ils eux aussi « noirs »? Quelle est la quête de Gaby, votre personnage principal ?
Vous l’avez noté, les hommes en noir, ce sont les policiers des unités d’intervention revêtus de leurs combinaisons de combat de couleur noire (un passage du roman explique d’ailleurs l’origine de ces tenues particulières), c’est aussi la couleur des habits des djihadistes quand ils se destinent au martyr (selon eux).
Il est intéressant là-aussi de souligner que ce parallèle est une des raisons du titre du livre, comme pour bien affirmer que les uns et les autres proclament à travers ces uniformes la même détermination.
Gaby est un personnage énigmatique à tout le moins ambiguë. Il est clairement positionné dans le « camp du bien » et tant qu’il est policier et chef de l’unité d’intervention, la situation est claire, on y voit de la force et de la conviction.
Les questionnements viendront quand il entrera dans le monde politique, une certaine fragilité apparaîtra alors. Gardera-t-il son idéal ? Le rapport à la politique à une certaine forme de célébrité et de gloire, aux ambitions personnelles, est posé dans ce roman tout simplement parce que c’est du vécu. Je me suis posé ce type de question, et la magie du récit me permet de l’évoquer. Je vous laisse le soin de découvrir les réponses que le héros y apporte.
C’est la puissance de ce type de narration, on peut faire évoluer ses héros de diverses manières, on peut souligner la complexité de leurs personnalités. Qu’ils soient « bons » ou « méchants » ils sont évolutifs (comme nous tous dans la vraie vie) et on peut même se permettre le luxe au fil de l’ouvrage de transformer des personnages insignifiants en acteurs majeurs de l’histoire.
Arrive-t-on à conserver ses idéaux quant on est confronté directement au monde politique. Est-il possible de porter ses combats sans se déjuger ?
On vient d’évoquer un peu ce thème, je vais vous répondre personnellement et ne pensez pas que cette position est celle de Gaby (là aussi la magie du roman permet aux personnages d’avoir une vie et des comportements propres).
Dans l’arène politique nous ne sommes pas condamnés à perdre nos illusions, nous sommes condamnés à un comportement solidaire avec le gouvernement que nous soutenons (je parle pour le député de la majorité que j’étais à l’époque), et nous avons bien du mal dans un calendrier que nous ne maîtrisons pas à continuer à faire vivre nos illusions et nos idéaux. Mais, divine surprise, il peut nous arriver de porter au plus haut des initiatives qui vont dans le sens de nos convictions. C’est ce qui m’est arrivé avec la « loi sur la sécurité globale » dont j’ai participé à la rédaction, que j’ai défendu et qui a été votée. Mais soyons clair ça n’est possible que si vous êtes connu, si vous avez une spécialité, si vous êtes influent, c’était peu ou prou mon cas. Pour les députés anonymes c’est la galère quotidienne car le système tourne autour du nombril de quelques-uns.
La notion du chef peut-elle être développée de manière identique dans le récit romanesque et dans la vraie vie ?
Dans « Les hommes en noir » il m’a été possible de confronter le charisme de deux types de chefs qui fonctionnent différemment compte-tenu de leurs objectifs et de leurs valeurs.
Le « méchant » tout d’abord dont le moteur essentiel pour diriger ses troupes, et ce n’est une surprise pour personne, est la haine et l’intolérance, par rapport aux autres et par rapport à leurs valeurs. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il est dénué de stratégie dans son combat, il développe même une certaine habileté, mais il est aussi sous influence d’une ambition personnelle.
En cela il se rapproche un peu de Gaby « le gentil ». J’ai voulu monter la part grise de ce chef, dont les outils de commandements sont à peu près semblables à ceux déployés dans la réalité. Mais le voyage au sein de sa personnalité nous livre dans ce domaine précis aussi, toutes les ambiguïtés que l’on peut nourrir quand on a le pouvoir de commandement dans une période de grand bouleversement ou la France entière à les yeux sur vous.
Dans la vraie vie, le chef du RAID est issu des corps des commissaires de police, leurs rôles quotidiens sont de gérer les services et de prendre les décisions difficiles sur le terrain. Sur le terrain j’insiste, car les décisions opérationnelles se prennent au contact des difficultés et à portée immédiate de vos hommes et femmes. Disons-le, tout net, un chef ne peut pas commander en temps de crise, de son bureau. Etre à proximité de ses troupes, c’est être dans l’exemplarité, c’est cette attitude qui créée la confiance et la confiance permet quant à elle la bonne exécution des décisions prises.
Et justement c’est à la décision que s’arrête la collégialité. La décision c’est l’apanage du chef et c’est toujours un crève-cœur. A ce moment précis le chef est seul et doit trancher (décisio: trancher en latin), il est en limite de ses savoirs et de ses intuitions et restera dans cette incertitude jusqu’au résultat final. Un chef, et en particulier politique doit pouvoir supporter cette pression fait d’un curieux mélange de solitude, d’incertitude et d’attente des effets de son choix.
Pour couronner le tout, en cas de résultat positif il convient de partager la gloire avec toute son équipe (la victoire a plusieurs pères), l’échec par contre, n’appartient qu’au décideur (l’échec est orphelin).
Ces inconvénients majeurs et ces dangers nécessitent une force d’âme, ce qui explique que dans le domaine politique comme dans d’autres, on ait peu de décideurs et beaucoup de critiqueurs.
Nous sommes aujourd’hui aux vœux du RAID à Bièvres, en présence de son chef Jean-Baptiste DULION. Souhaitez-vous lui adresser un mot, et à ses équipes ?
Cette tradition des voeux du RAID le dernier vendredi du mois de janvier est extraordinaire, elle a été perpétuée par tous les chefs du RAID qui se sont succédé et c’est une très bonne chose. Cette année encore on peut voir toutes sortes de personnes qui à un moment ou à un autre ont défendu l’image et les interêts de la police en général et du RAID en particulier.
Jean-Baptiste Dulion est un très bon chef du RAID et une belle personnalité respectée de tous. Il a continué le mouvement d’intégration des GIPN que nous avions entamé en 2015 en transformant ces équipes existantes au niveau métropolitain en antennes du RAID et en en créant d’autres. Jean-Baptiste et son équipe de commandement ont su accompagner les anciens GIPN d’outre-mer vers un nouveau format d’antenne RAID là-aussi d’autres créations (en Guyane en particulier) sont prévues.
Le RAID s’est aussi distingué lors de l’évacuation de l’ambassade d’Afghanistan, et dans certains territoires ultra-marins (Mayotte actuellement), cela prouve que depuis sa création cette unité et ses membres n’ont cessé de s’adapter et sont devenus maintenant incontournables lors de crises majeures.
Je souhaite que ce mouvement continue et s’amplifie et que cette technicité incontestable soit diffusée au delà de toutes polémiques par les anciens, qui constituent à la fois la mémoire du service et sa meilleure caisse de résonance à l’extérieur de notre institution policière.
Un mot sur la menace terroriste à l’heure actuelle ? Peut-on tout s’autoriser pour lutter contre cette menace?
La menace terroriste est toujours présente aujourd’hui, même si elle a changé de paradigme. Cette menace n’est plus (pour l’instant) une menace de réseau, c’est une menace endogène (la France nourrit en son sein, comme d’autres pays, son propre terreau de terrorisme). Il est donc nécessaire de ne pas relâcher notre attention et de débusquer les dangers qui s’infiltreraient à l’intérieur de nos systèmes démocratiques.
Pour autant la nébuleuse terroriste demande plus que jamais un suivi et une collaboration à l’international, depuis 2015 les choses ont évolué grâce à la technicité de nos services de renseignements, d’enquêtes et d’intervention. Je peux vous dire aussi en tant qu’ancien député que les législations se sont adaptées pour donner plus d’outils aux spécialistes de terrain. La collaboration étroite s’organise d’abord autour des pays européens qu’ils soient frontaliers ou non, mais aussi avec un certains nombre de pays qui subissent les mêmes attaques et sont soumis aux-mêmes dangers. Je pense en particulier à nos alliés traditionnels, mais aussi à nombre de nations dans le pourtour du bassin méditerranéen.
Contrer la menace à l’extérieur comme l’infiltration à l’intérieur c’est exactement ce type de thématique, de danger et de rebondissement qui est développé dans « Les hommes en noir », sous une forme originale que je vous laisse le soin de découvrir.
Votre dernière question est aussi une des thématiques du roman est-on autorisé à tout pour lutter contre la barbarie ?
Ma réponse d’ancien policier et homme politique est clairement non, mais à la condition expresse d’adapter nos législations à la mouvance régulière des menaces car il ne faut jamais laisser notre démocratie sans défense.
LES DEDICACES ET LES IMAGES SOUVENIRS
Un remerciement Jean-Michel pour notre entretien agréable et instructif. La lecture de chaque ouvrage est passionnante, je ne peux que recommander ! Le personnage de Gaby est attachant, l’intrigue avec Wahid inquiétante, bien menée. La plume est fluide et facile à la compréhension.
Un hommage à M. Robert BROUSSARD, avec lequel je me suis entretenue avec joie, fondateur du RAID il y a « Presque 40 ans » comme évoquait M. Frédéric VEAUX. La date de création de l’unité d’élite de la Police nationale date du 23 octobre 1985. Son premier patron est M. Ange MANCINI, une légende.
L’acronyme RAID signifie Recherche, Assistance, Intervention, Dissuasion et la devise est : SERVIR SANS FAILLIR.
Je souhaite tous mes voeux au RAID pour 2023, une pleine réussite dans vos missions.
Avec mon plus grand Respect.
Nous nous quittons avec M. Robert BROUSSARD 🇨🇵
Un remerciement au photographe présent aux vœux pour son professionnalisme et sa gentillesse de me transmettre les photos ce week-end © DR
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