Lundi 6 décembre 2021 – Les ministres des Affaires sociales des Vingt-Sept, réunis au sein du Conseil de l’UE, ont adopté à une large majorité la proposition de la Commission européenne visant à instaurer des “salaires minimums adéquats” en Europe.
“Sur le terrain salarial, c’est un accord important, et presque inespéré, qu’ont conclu, lundi 6 décembre, les ministres européens des Affaires sociales”, résume Le Monde. Deux semaines après le vote du Parlement européen en faveur du projet de la Commission européenne, le Conseil de l’UE a donc également “adopté une position commune quant à l’instauration de ‘salaires minimums adéquats’ dans les Etats membres” [La Tribune]. Les “seules dissidences” sont venues “du Danemark et de la Hongrie”, complète Euractiv.
Selon Nicolas Schmit, commissaire européen à l’Emploi, il s’agit de démontrer que “l’Europe ne peut pas être le continent où des gens ne peuvent vivre de leur salaire” [Le Monde].
Pas un, mais des salaires minimums
“Le projet se veut un signal politique fort. Il n’en reste pas moins d’une portée réelle très limitée”, font remarquer Les Echos. La directive n’envisage aucunement la mise en place d’un “SMIC européen” : “cela serait contraire aux traités, qui limitent les pouvoirs communautaires en matière sociale, et intenable économiquement tant les minimums mensuels varient au sein de l’Union”, explique le journal économique. Selon Eurostat, “les salaires minimums mensuels varient considérablement dans l’UE, allant de 332 euros en Bulgarie à 2 202 euros au Luxembourg” [La Libre]. Bien que les niveaux de vie soient différents d’un Etat membre à l’autre, “les salaires de certains pays d’Europe de l’Est confèrent tout de même un pouvoir d’achat bien en deçà de la moyenne européenne aux travailleurs concernés”, d’après les données de l’institut de statistique européen [La Tribune].
“Le texte n’oblige pas non plus à introduire un salaire minimum dans les six pays qui n’en disposent pas (Autriche, Chypre, Danemark, Finlande, Italie, Suède)”, précise Ouest-France. Dans ces Etats, les systèmes reposent “sur des conventions collectives négociées, branche par branche, entre les employeurs et les syndicats”, souligne La Croix.
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La proposition vise en revanche à adopter “une position commune concernant des règles nouvelles”, explique Le Monde. Pour Les Echos, “l’objectif prioritaire du texte est bien de pousser à la hausse [les salaires les plus faibles]”. Un moyen de “combattre tant le dumping social que le phénomène des ‘travailleurs pauvres’, qui concernerait actuellement 10 % de ceux qui ont un emploi” [Le Monde].
Rien ne précise cependant la marche à suivre pour les 21 Etats membres disposant d’un salaire minimum. “La seule indication chiffrée esquissée par la Commission – celle de fixer les salaires minimums à 60 % du salaire médian brut ou à 50 % du salaire moyen brut – n’a rien de contraignant”, indique La Croix. Pour le journal, “seule une directive très souple, laissant une grande marge de manœuvre aux capitales européennes, [pourrait] apparaître comme acceptable aux pays scandinaves”.
En revanche, le projet met la “pression sur l’Europe centrale”, indiquent Les Echos. Le journal rappelle que le texte “joue avant tout sur le levier de la négociation collective, en vue de la renforcer et de l’étendre. Les pays où la négociation collective couvre moins de 70 % des salariés devront l’étendre par la loi ou par un accord interprofessionnel. L’Europe centrale et de l’Est, en retard en la matière, sera de facto la plus concernée”.
Un dossier prioritaire pour la PFUE ?
Les négociations sont cependant loin d’être closes. En effet, “les discussions vont pouvoir commencer entre le Parlement européen et le Conseil […] pour adopter un texte” [L’Humanité]. Et “les trilogues [qui démarreront en janvier] seront ‘tendus’, prédisent des sources européennes”, relayées par Les Echos. “Des pays comme la France poussent à ‘faire converger’ les bas salaires à marche soutenue et le projet adopté par le Parlement est plus ambitieux que le compromis du Conseil” [Les Echos].
Si cet accord a bénéficié d’un “large soutien” parmi les ministres de l’UE, un diplomate européen assure qu’ ”un message fort de ne pas s’écarter du texte a été envoyé aux Français” [La Tribune]. “Les trilogues démarreront [effectivement] en janvier et Paris peut bien espérer un accord final durant sa présidence du Conseil de l’UE, au premier semestre”, notent Les Echos.
A partir du 1er janvier, débutera en effet la treizième présidence française du Conseil (PFUE). “Emmanuel Macron tiendra une conférence de presse jeudi pour [en] présenter les priorités” [Le Figaro]. Plusieurs textes d’ores et déjà lancés en Europe devraient être mentionnés par le chef de l’Etat. “Ce pourrait être le cas de l’instauration d’un salaire minimum européen”, rapportent plusieurs médias dont Les Echos.