La Commission d’enrichissement de la langue française, placée sous l’autorité du Premier ministre et présidée par M. Frédéric Vitoux, de l’Académie française, présente, pour l’année 2020, le bilan des activités du dispositif d’enrichissement de la langue française, dont elle a la responsabilité.
Ce dispositif interministériel et interinstitutionnel, institué par le décret du 3 juillet 1996 relatif à l’enrichissement de la langue française modifié par le décret du 25 mars 2015, est l’un des instruments d’une politique linguistique qui vise à garantir l’emploi du français dans les diverses circonstances de la vie citoyenne. Il met à la disposition des services de l’État comme des acteurs économiques un vocabulaire français adapté aux besoins d’une communication claire et accessible au plus grand nombre. En plus de faciliter l’accès aux savoirs scientifiques et techniques, le dispositif d’enrichissement de la langue française rappelle à un large public l’importance de disposer d’un vocabulaire français, et d’en user afin de préserver la fonctionnalité de notre langue.
Le dispositif d’enrichissement de la langue française a poursuivi ses travaux de définition et de choix de termes de référence dans des circonstances exceptionnelles. La pandémie de COVID-19 a été à l’origine d’un déferlement de termes scientifiques et techniques dans la vie quotidienne des Françaises et des Français. Il s’agissait très largement de termes connus des seuls spécialistes – biologistes, épidémiologistes, médecins principalement – et absents des dictionnaires de français courant, faisant irruption dans les médias comme dans les conversations quotidiennes sans que les locuteurs en connaissent précisément le sens. Ce phénomène souligne combien il est nécessaire de disposer de ressources terminologiques de qualité, avec des définitions précises, justes scientifiquement mais compréhensibles par le plus grand nombre.
Les experts du dispositif ont donc adapté leur veille et leurs travaux terminologiques au contexte de la pandémie. Et la Délégation générale à la langue française et aux langues de France a revu son programme de publication pour répondre au besoin de nos concitoyens en matière d’information médicale fiable et de confiance dans les médias. Ainsi, elle a diffusé dès avril les nouvelles brochures Quelques termes de santé et Quelques termes de l’information et de la désinformation, avant de rééditer le Vocabulaire de la santé et de la médecine, en même temps qu’un nouveau dépliant Crise sanitaire, le dire en français.
L’année 2020 a aussi été marquée par l’émergence de nouveaux mots et notions, difficiles à cerner et à l’existence souvent éphémère. Ainsi, si l’anglicisme infodemics, en français infodémie, dont l’invention est attribuée à un responsable de l’Organisation mondiale de la santé, a été décrit par certains comme un simple excès d’informations, d’autres y ont vu une épidémie d’infox sur la pandémie, et le sens exact reste à ce jour indéterminé. L’emploi de ce néologisme obscur semble s’essouffler et son extinction est possible. Autre exemple avec l’apparition et la succession au fil des semaines des quatorzaines, dizaines, huitaines ou septaines, accompagnant l’évolution des connaissances sur la fenêtre de transmission du virus. Finalement, c’est le mot quarantaine, signifiant « isolement de durée variable imposé à des personnes contagieuses ou supposées contagieuses », qui a repris le dessus.
La fragilité de ces phénomènes néologiques rappelle que la terminologie, qui est une discipline exigeante reposant sur l’expertise, la précision et l’observation de l’usage, se pratique difficilement dans l’urgence et sans un solide processus de normalisation tel que celui du dispositif d’enrichissement de la langue française.
La terminologie et la néologie des sciences et des techniques en français ne peuvent exister et se développer indépendamment de la langue française que nos concitoyens pratiquent au quotidien. Comment aborder le bilan des travaux du dispositif d’enrichissement de la langue française sans évoquer la disparition de trois personnalités, trois grands témoins et acteurs de cette frontière où se mêlent langues de spécialités et langue générale ?
L’académicien Marc Fumaroli, qui présida la Commission de 2006 à 2016, est décédé le 24 juin. Essayiste et historien de la littérature, il avait mis son engagement passionné pour la langue française au service des vocabulaires spécialisés. Faisant montre d’un étonnement constant dans le dialogue avec les scientifiques permettant de restituer les notions les plus complexes dans une langue claire, précise et accessible, Marc Fumaroli incarnait l’esprit de vulgarisation du dispositif.
Alain Rey, lexicographe et linguiste, qui a siégé à la Commission d’enrichissement de la langue française durant près de 20 ans, témoignait de la perméabilité entre terminologie et lexicographie, de ce va-et-vient permanent des mots entre langue générale et vocabulaires spécialisés. Il nous rappelait que les termes scientifiques et techniques ne sont que des mots soustraits au français courant pour prendre une signification spécifique dans un domaine. Et ces termes redeviennent mots dans les dictionnaires de langue générale lorsque la technique devient commune. L’immense savoir d’Alain Rey était donc un atout essentiel au moment de choisir le terme le plus approprié et le plus parlant pour tout francophone.
Si le professeur Jean-François Sablayrolles n’a pas participé à la Commission d’enrichissement de la langue française, ses travaux de classification des néologismes et la revue Neologica qu’il a cofondée en 2007 sont essentiels à la terminologie et au dispositif. La néologie n’est pas seulement la science des mots nouveaux du quotidien, elle doit énormément aux milliers de termes et de sens nouveaux sans cesse forgés dans les entreprises, les usines ou les laboratoires. L’œuvre scientifique de Jean-François Sablayrolles nous remémore qu’un terme technique nouveau, un mot ou un assemblage de mots, est un néologisme.
La Commission d’enrichissement de la langue française et ses 19 groupes d’experts ont défini, nommé et recommandé en 2020 plus de 200 néologismes techniques, dont certains deviendront probablement des mots courants de la langue française.
Les acteurs du dispositif d’enrichissement de la langue française
Placée auprès du Premier ministre, la Commission d’enrichissement de la langue française (CELF) est la clé de voûte du dispositif interministériel. Sa mission est «de favoriser l’enri- chissement de la langue française, de développer son utilisation, notamment dans la vie économique, les travaux scientifiques et les activités techniques et juridiques, d’améliorer sa diffusion en proposant des termes et expressions nouveaux pouvant servir de référence, de contribuer au rayonnement de la francophonie et de promouvoir le plurilinguisme » (art. 11). Elle est responsable de la publication au Journal officiel de toutes les listes de termes qu’elle a examinées et validées.
En 2020, la Commission d’enrichissement de la langue française est composée de 19 membres : son président, Frédéric Vitoux, de l’Académie française, six membres de droit dont le Secrétaire perpétuel de l’Académie française, l’un des deux Secrétaires perpétuels de l’Académie des sciences, le délégué général à la langue française et aux langues de France, le représentant de l’Organisation internationale de la francophonie, le président du Conseil supérieur de l’Audiovisuel, le président de l’AFNOR, et douze personnalités qualifiées nommées par le ministre de la Culture sur proposition des ministres et des autorités désignés par le décret modificatif du 25 mars 2015. Elle respecte le principe de la parité entre les hommes et les femmes.
La Commission, ayant d’une certaine façon la fonction de banc d’essai avant publication officielle, est composée de personnalités susceptibles de dialoguer avec les experts et de se mettre dans la position du néophyte. Les douze personnalités qualifiées désignées pour intégrer la Commission ont donc des profils divers : deux ambassadeurs, une avocate générale, une correctrice-réviseuse, une inspectrice générale de physique-chimie, un ingénieur général des mines, un éditeur et journaliste scientifique, des professeurs de lettres et de lettres classiques, une physicienne, une romancière.
Un réseau d’experts qui couvre 14 ministères
La Commission d’enrichissement s’appuie avant tout sur un réseau couvrant 14 ministères et organisé en 19 groupes d’experts supervisés par 11 hauts fonctionnaires chargés de la terminologie et de la langue française (HFTLF).
La Délégation générale à la langue française et aux langues de France
Sous l’autorité directe du ministre de la Culture, la Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) oriente et coordonne les politiques publiques visant à garantir l’emploi de la langue française, à promouvoir son usage et à assurer son enrichissement. Elle veille par conséquent à l’application du décret du 3 juillet 1996 relatif à l’enrichissement de la langue française. Service d’appui de la Commission d’enrichissement de la langue française (art. 2-6) dont elle assure le secrétariat permanent, la DGLFLF coordonne l’ensemble du dispositif interministériel d’enrichissement de la langue française, et suit les relations avec les différents partenaires. Enfin, elle a pour mission de faire connaître au grand public les termes publiés au Journal officiel et de favoriser leur appropriation par le plus grand nombre.
Le suivi du dispositif d’enrichissement de la langue française est confié, au sein de la Délégation générale à la langue française et aux langues de France, à la Mission du développement et de l’enrichissement de la langue française dont les responsabilités s’étendent, au-delà de la terminologie, aux questions relatives à l’évolution du français, en particulier dans l’administration (actions en faveur de la simplification du langage administratif, réforme de l’orthographe, féminisation des noms de métiers…). La Mission est responsable de l’alimentation et du développement du site FranceTerme. Elle est chargée de la rédaction, de l’édition et de la diffusion du présent rapport annuel de la Commission d’enrichissement (art. 14).
Le personnel permanent de cette Mission se compose en 2020 de six personnes: une cheffe de Mission, partie à la retraite en août, une assistante, un chargé de mission pour la terminologie assisté de deux terminologues, et une chargée de mission pour la promotion de la terminologie officielle. Une terminologue vacataire est venue renforcer l’effectif lorsque le pilotage par intérim de la Mission a été confié au chargé de mission pour la terminologie.
La DGLFLF, qui prend en charge les dépenses de fonctionnement de la CELF (art. 2), apporte un soutien financier aux partenaires institutionnels du dispositif d’enrichissement de la langue française pour leur contribution aux travaux de terminologie et de néologie. En 2020, la Délégation générale a renouvelé ses subventions à l’Académie française pour la participation du Service du Dictionnaire aux travaux du dispositif, et aux deux équipes universitaires chargées des recherches documentaires sur les termes étudiés par les groupes d’experts: le Centre de recherche en terminologie et traduction (CRTT) de l’université Lyon 2 et le LATTICE (laboratoire Langues, Textes, Traitements informatiques et Cognition) CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle.
Les partenaires de la Commission d’enrichissement de la langue française
Organisée en réseau, la Commission d’enrichissement « travaille en liaison avec les organismes de terminologie et de néologie des pays francophones et des organisations internationales ainsi qu’avec les organismes de normalisation » (art. 1). Elle tire sa légitimité de sa concerta- tion avec ses nombreux partenaires.
- L’Académie française
- L’Académie des sciences
- Les organismes des autres pays francophone
- Les équipes universitaires de terminologie
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L’Association française de normalisation (AFNOR)
Les 4 grands thèmes ont particulièrement mobilisé le dispositif d’enrichissement en 2020
- Les craintes et les préoccupations concernant l’avenir de la planète :
La description des dégradations de l’environnement et des solutions recherchées, à tout le moins pour limiter ces dégradations, domine les travaux de plusieurs groupes d’experts. Celui chargé du vocabulaire des transports, dans la continuité de la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités, observe les transports individuels et le recours accru aux bicyclettes avec les termes gyroplanche (en anglais hoverboard), gyroroue et son synonyme monoroue (gyrowheel), sas pour vélo, vélo-école ou encore vélo-cargo (cargo bike). Les spécialistes de l’environnement étudient la destruction des océans et des littoraux avec les termes alluvionnement, et son synonyme aggradation (en anglaisaggradation), compression côtière, continent de plastique (plastic soup), réalimentation de plage (beach nourishment, beach replenishment), remodelage ou reprofilage de plage (beach scraping), trait de côte (coast line); ils se penchent également sur la nécessité de définir des théories émergentes comme le catastrophisme, la collapsologie ou la théorie de l’effondrement. Concernant la recherche de pratiques agricoles plus respectueuses des sols et des écosystèmes, l’attention des experts est retenue notamment par les termes agriculture climato-compatible (en anglais climate-smart farming), agriculture de conservation (des sols) (conservation farming), agriculture naturelle ou son synonyme agriculture sauvage (wild farming), ou encore permaculture.
- Les apports du numérique :
Le recours aux dispositifs numériques poursuit sa croissance et gagne progressivement tous les domaines. Parmi les termes étudiés ou en cours d’étude, on note dans le secteur agricole l’arrivée de l’agriculture collaborative (en anglais cofarming), de l’agriculture de pointe (agtech, digital agriculture, smart farming), des techniques agricoles de pointe (agricultural technology, agtech) et des techniques agroalimentaires de pointe (foodtech). Arrivent dans les usines des robots collaboratifs (cobot, collaborative robot) et dans les ateliers de confection la technologie de la mode, abrégée en technomode (fashion tech, fashion technology). Le compte de mobilité et son synonyme mobicompte (account-based ticketing ou ABT) annoncent une révolution dans l’utilisation des transports collectifs, tandis que l’éclairage public interactif (smart lighting) lutte contre le gaspillage énergétique dans des villes intelligentes ou villes interactives (connected city, digital city, smart city). Les trajets des automobilistes sont facilités par les communications de véhicule à infrastructure, de véhicule à réseau ou de véhicule à véhicule (vehicle-to-infrastructure communication, V2I communication ; vehicle-to-network communication, V2N communication ; vehicle-to-vehicle communication, V2V communication). Les étudiants peuvent mettre en ligne, dans une badgeothèque (backpack), des badges numériques (digital badge, open badge), attestant de leurs savoir-être et de leurs savoir-faire. Enfin, la criminalistique numérique (digital forensics) est un atout précieux pour la résolution des enquêtes criminelles.
- Mais aussi l’usage du numérique à des fins malveillantes :
Le numérique n’est hélas pas seulement source de progrès. Il devient un outil de manipu- lation avec la contrefaçon d’opinion (en anglais astroturfing) et la substitution de visage (face swap), initialement conçue à des fins ludiques; un vecteur de propagation de la haine par des haineurs ou fauteurs de haine (hater), et de malveillances multiples comme le piège à clics (clickbait). Crimes et délits numériques constituent désormais le quotidien des experts du collège du ministère de la Justice : attaque aux ultrasons (dolphin attack), détournement ou piratage de formulaire (formjacking), détourneur de cybermonnaie (cryp- tostealer, cryptostealer malware), hameçonnage ciblé (spear phishing, targeted phishing), harponnage (whale phishing, whaling), piratage de distributeur automatique (jackpotting), piratage psychologique (social engineering), vol d’image sous la jupe (upskirting)…
- Le vocabulaire lié à la pandémie due au virus SARS-CoV-2 :
Si la pandémie a été accompagnée dans les médias d’un déferlement de termes de biologie, de médecine et de pharmacie anciens et peu connus du grand public (ARN messager a été recommandé en 1990…), parfois utilisés en anglais (comme cluster alors qu’existent les termes foyer épidémique et grappe, publié en 2008), très peu de termes nouveaux ont été repérés par les différents groupes d’experts concernés. En revanche, la nécessité de définitions normalisées pouvant éclairer les scientifiques et le grand public a été identifiée pour des termes français déjà bien implantés : identification des contacts (en anglais contact tracing) et traçage (tracking), communs aux épidémiologistes et aux enquêteurs de police, ou encore comorbidité et multimorbidité, qu’il convient clairement de distinguer.
Clin d’oeil de Miss Konfidentielle : le français mis sur orbite
Parce qu’elles sont indissociables d’un progrès technologique et scientifique de haut niveau, l’étude des astres et la conquête spatiale donnent régulièrement lieu à l’élaboration d’un vocabulaire nouveau : ainsi, tels des corps célestes récemment découverts, les termes impacteur, protection planétaire ou encore retrait sélectif de débris viennent désormais enrichir notre univers linguistique… Découvrez les termes de la spatiologie et de l’astronomie publiés par la Commission d’enrichissement de la langue française au Journal officiel du 26 septembre 2020.
Si, en dépit des progrès de la science, le Soleil n’a pas encore pu concrétiser de rendez-vous avec la Lune, certains rapprochements sont cependant possibles dans l’espace… En effet, il arrive d’assister à une rencontre (encounter en anglais) entre objets spatiaux (space objects) ou corps célestes, laquelle aboutit parfois à un rendez-vous spatial – terme qui vient remplacer l’expression anglophone space rendez-vous, preuve s’il en est que, dans l’univers lexical, les mots eux non plus ne cessent de voyager.
Mais là-haut comme sur Terre, il est des rencontres plus ou moins heureuses : nul corps céleste n’est à l’abri de croiser la route d’un impacteur (impactor). Plus spécifiquement, la Terre peut, par exemple, être percutée par un géocroiseur ; mais la défense planétaire (planetary defense) vise à prévenir une telle collision ou à en limiter les dégâts. Cette défense planétaire ne doit pas être confondue avec la protection planétaire (planetary protection), qui vise à protéger un astre d’une contamination possible au retour d’une mission d’exploration spatiale. Bien que cette protection concerne également des objets célestes autres que les planètes, les experts ont tout de même entériné l’expression « protection planétaire » car elle largement implantée dans l’usage professionnel.
Enfin, l’on essaiera de mettre fin à l’aventure spatiale sans pertes (de débris) et fracas (de collisions ou d’explosions), notamment grâce à deux types d’opérations qui visent à sécuriser la vie cosmique : le retrait de service (en anglais post-mission disposal ou PMD), effectué en fin de mission, et le retrait sélectif de débris ou RSD (en anglais active debris removal ou ADR), qui permet de limiter les collisions entre les plus gros débris, et par là même la création de nouveaux débris.
Si vous avez des étoiles dans les yeux en découvrant ce vocabulaire qui décrit bien la sécurité qui accompagne le progrès technique, nous vous invitons à poursuivre cette exploration lexicale en embarquant dans la liste publiée le 26 septembre 2020 !
En quelques semaines, les experts du dispositif se sont adaptés aux contraintes des réunions à distance, alors que depuis cinquante ans le fonctionnement des groupes reposait sur des échanges collectifs, en présence, au cours desquels les interactions non verbales entre scientifiques – incompréhension, doute, approbation – sont essentielles pour fluidifier et diligenter l’élaboration des définitions et l’invention des termes. Les experts, bénévoles, ont consacré un temps accru au dispositif, compensant ainsi la moindre efficacité des visioconférences et la nécessaire adaptation à de nouveaux processus de réflexion et de travail terminologiques. Ces méthodes de travail à distance ont élargi les possibilités de déploiement des travaux terminologiques en facilitant la participation de techniciens et d’autres spécialistes qui résident en province. Le dispositif sort ainsi de la crise sanitaire moins parisien et plus représentatif du territoire national et de la francophonie.
La pandémie a aussi mis à nu les moyens matériels et techniques encore insuffisants – certes compensés par ceux du ministère de la Culture et l’action de ses agents – dont disposent certains collèges de terminologie pour exercer leurs missions. La crise sanitaire a été un accélérateur dans les ministères pour adapter le fonctionnement des collèges et pour identifier les solutions à mettre en place dans les années à venir. La ténacité des hauts fonctionnaires chargés de la terminologie et de la langue française à accroître les moyens ne doit pas faiblir.
L’engagement déterminé et persévérant des membres du dispositif pour que notre langue ne reste pas en retrait par rapport aux innovations de la science et de la technologie est donc intact. Il est même fortifié: l’irruption dans les médias d’un vocabulaire scientifique et technique, voire parfois d’anglicismes, souvent peu compréhensibles pour la majorité de nos concitoyens, a renforcé chez les membres des collèges et de la Commission d’enri- chissement de la langue française la conviction qu’ils sont à l’avant-poste pour réduire les fractures entre la langue courante et les langages de spécialité.
Si préserver les capacités de production terminologique et néologique est essentiel, accroître l’audience du dispositif l’est tout autant afin de favoriser l’appropriation de la terminologie recommandée, tant par les services de l’État que par les professionnels de domaines hautement spécialisés et par un vaste public de néophytes. Les efforts de déploiement d’outils numériques commencent à porter leurs fruits – la fréquentation du site FranceTerme a retrouvé depuis deux ans une forte progression, le nombre d’abonnés à la nouvelle infolettre croît tout aussi fortement, les initiatives de diffusion se multiplient dans les ministères et les collèges – et montrent la voie. Ces efforts doivent se poursuivre, le soutien de la part des autorités de l’État étant déterminant pour la réussite de cette entreprise.
L’action du dispositif d’enrichissement de la langue française est au service de nos concitoyens, en cela elle contribue au respect du droit au français de chacun dans toutes les circonstances du quotidien. Cette action au long cours entretient la confiance des citoyens et des francophones dans la capacité de notre langue à s’adapter aux évolutions. Mais pas seulement : en leur permettant de comprendre les innovations du monde contemporain, elle leur redonne confiance dans les sciences et les techniques.
Rapport annuel 2020 de la Commission d’enrichissement de la langue française sur misskonfidentielle