Miss Konfidentielle est sensibilisĂ©e par la dĂ©marche de la violoncelliste HĂ©loĂŻse Luzzati, formĂ©e au Conservatoire de Paris, qui consiste Ă s’engager avec son association Elles Creative Women Ă redonner plus de visibilitĂ© aux Ĺ“uvres de compositrices oubliĂ©es. Comment ? En organisant du 1er au 24 dĂ©cembre 2020 un festival 100% numĂ©rique afin de nous permettre, quelque soit le lieu oĂą nous serons, de dĂ©couvrir 24 d’entre elles. Une excellente idĂ©e ! En 24 jours, ce calendrier de l’Avent musical mettra Ă l’honneur les chefs-d’Ĺ“uvre de 24 compositrices de toutes les nationalitĂ©s et toutes les Ă©poques.
🎼 À la recherche des partitions de musiciennes classiques oubliées
Aujourd’hui, en France, seuls 4 % des compositeurs de musique classique sont des femmes. Cette statistique douloureuse est représentative d’un champ artistique qui n’a pas encore achevé une égalité de fait entre les femmes et les hommes. C’est le constat amer d’Héloïse Luzzati lorsqu’elle réalise qu’en 25 ans de pratique, elle n’a jamais joué de partition écrite par une femme. Elle aime alors mettre au défi son entourage de musiciens renommés ou non, et leur demande de citer cinq noms de compositrices jouées récemment dans leurs répertoires. Sans surprise, l’exercice se traduit souvent par une incapacité à les nommer.
Pourquoi ces musiciennes ont-elles Ă©tĂ© oubliĂ©es de l’Histoire ? Cette question sera l’origine de l’engagement d’HĂ©loĂŻse Luzzati pour, dit-elle, “dĂ©sinvisibiliser” ces femmes talentueuses qui ont pourtant produit de vĂ©ritables chefs-d’Ĺ“uvre de musique classique. HĂ©loĂŻse Luzzati s’engage alors aux cĂ´tĂ©s d’autres bĂ©nĂ©voles dans des travaux de recherche et parcourt les bibliothèques pour retracer l’histoire et les pièces de ces compositrices mĂ©connues. La violoncelliste note qu’au XIXème siècle, la France comptait davantage de compositrices qu’aujourd’hui.
Dans ce travail d’archivage, la violoncelliste fait face Ă de nombreux obstacles : des partitions non-empruntables, Ă©garĂ©es ou qui n’apparaissent pas dans les catalogues. HĂ©loĂŻse Luzzati pointe Ă©galement la loi de l’offre et de la demande qui limite l’inventaire des maisons d’Ă©dition. Certaines partitions ont Ă©tĂ©Â Ă©ditĂ©es et jouĂ©es Ă une Ă©poque, mais aujourd’hui le manque de demande les fait disparaĂ®tre et ces documents ne sont pas rĂ©Ă©ditĂ©s. Riche de son expĂ©rience au Conservatoire de Paris, HĂ©loĂŻse Luzzati plaide pour que les bibliothèques des conservatoires aient les moyens de se doter de partitions de compositrices. Ă€ cette fin, les Ă©tudiants auraient plus facilement accès Ă un rĂ©pertoire variĂ© avec davantage de crĂ©ations fĂ©minines.
Dans cette quête infinie, la violoncelliste n’est pas seule. Héloïse Luzzati salue le projet « Demander à Clara » qui porte le même combat. Redonner une place aux femmes dans les répertoires de musique classique s’inscrit selon elle dans une “démarche d’utilité publique”. En effet, la diffusion de modèles féminins est importante pour susciter des vocations.
🎼 Programmer les œuvres des compositrices : festival “Un temps pour noElles”
Avec seulement 1 % d’Ĺ“uvres de compositrices classiques jouĂ©es en salle, la violoncelliste dĂ©nonce un manque d’audace et de curiositĂ© dans la majoritĂ© des programmations. HĂ©loĂŻse Luzzati l’affirme :
Ce n’est pas le genre de l’auteur qui importe mais se dĂ©sintĂ©resser des compositrices nous prive de chefs-d’Ĺ“uvre qui mĂ©ritent d’être partagĂ©s avec le plus grand nombre.
Pour faire (re)dĂ©couvrir aux publics les Ĺ“uvres de compositrices classiques, HĂ©loĂŻse Luzzati fonde l’association Elles Creative Women. Avec le soutien de la DRAC au titre de l’Ă©tĂ© culturel en ĂŽle-de-France, la violoncelliste et Lou Brault imaginent pendant le confinement du printemps 2020, le festival “Un temps pour Elles” au Château Rosa Bonheur Ă Thomery, en Seine-et-Marne. Sans transiger sur la qualitĂ©, elles montent une riche programmation exclusivement dĂ©diĂ©e aux compositrices d’hier et d’aujourd’hui.
Le succès de cette première édition du festival “Un temps pour elle » encourage Héloïse Luzzati à poursuivre sa démarche. À l’heure de la crise sanitaire, Héloïse Luzzati et son équipe misent sur une offre culturelle 100 % numérique, avec l’enjeu de faire honneur au spectacle vivant dans une forme dématérialisée. Du 1er au 24 décembre, l’association Elles Creative Women diffusera chaque jour sur ses pages Facebook et YouTube, une capsule musicale d’une œuvre composée par une femme, interprétée par des artistes de renom.
Tourné dans le cadre exceptionnel du château Rosa Bonheur, demeure de l’artiste peintre labellisée Maison des Illustres, le festival “Un Temps pour noElles” profite de ce lieu chargé d’histoire pour enchanter la période de Noël.
Ce calendrier de l’Avent musical est conçu comme un véritable outil de médiation pour favoriser la connaissance de ces musiciennes oubliées. La co-fondatrice du festival espère également par ce biais convaincre les programmateurs d’inclure plus largement les compositrices dans les répertoires présentés.
À l’horizon 2021, Héloïse Luzzati souhaite monter un label pour enregistrer et distribuer les œuvres majeures découvertes au fil de ses années de recherche. Déterminée et positive, la violoncelliste souhaite sceller des partenariats avec de nouveaux lieux de diffusion, emblématiques pour la création féminine.
Consciente de l’importance d’une pédagogie dès l’enfance, Héloïse Luzzati entend mener un projet à destination du jeune public avec la création d’un livre-disque pour éveiller les enfants à la musique classique des compositrices. À travers ce projet qui ne peut se faire qu’en complicité avec des compositrices contemporaines, illustratrices et autres femmes artistes, la fondatrice de Elles Creative Women souhaite fédérer le plus grand nombre pour défendre la création artistique féminine et participer à fonder une véritable égalité dans le champ culturel.
Pour en savoir plus : Page Facebook de l’association Elles Creative Women
🇫🇷 L’Ă©galitĂ© femmes-hommes : grande cause nationale partagĂ©e avec le ministère de la Culture
L’égalité entre les femmes et les hommes a été consacrée « grande cause nationale » par le président de la République pour toute la durée du quinquennat. Depuis le 6 novembre 2017, la DRAC Ile-de-France est labellisée par l’AFNOR pour sa politique en faveur de la diversité et de l’égalité professionnelle femmes-hommes. Le plan d’action de la DRAC s’inscrit dans la démarche globale engagée par le ministère de la Culture, et notamment dans le cadre de la feuille de route égalité 2019-2022 présentée par le 3 avril 2019.