15 février 2020 – Miss Konfidentielle vous invite à lire l’interview de Emilie Maisonneuve, conservateur de patrimoine et directrice du musée Lambinet situé en plein coeur de la ville de Versailles. Une jolie manière de vous sensibiliser au patrimoine de la ville. Car en effet, il n’y a pas que le château ! Versailles est une perle à découvrir en prenant son temps…
Bonjour Emilie,
Le musée Lambinet est un des joyaux de la ville de Versailles. Pour les lecteurs qui ne connaissent pas le musée, pouvez-vous nous le présenter ?
Avec plaisir.
Le musée Lambinet est situé à deux pas de la gare de Versailles Rive-droite, aux abords du quartier très vivant de Notre-Dame. Il s’agit d’un hôtel particulier du XVIIIe siècle, offert en 1929 par Madame Nathalie Lambinet afin d’y créer un musée. Celui-ci ouvre ses portes en 1929 avec des collections Beaux-arts transférées depuis la bibliothèque municipale. Depuis, le musée ne cesse d’enrichir ses collections avec des dons, des achats mais aussi quelques dépôts.
Au cours de cette année, le musée Lambinet commencera sa rénovation muséographique. Nous profitons en effet de travaux sur certaines de nos fenêtres pour revoir le parcours qui n’était pas assez cohérent. Nous commençons par le 2e étage consacré à l’histoire de la ville de Versailles dont la réouverture est prévue avant l’été avant de nous attaquer au 1e étage sui fait la part belle à l’art de vivre à Versailles avec la reconstitution d’un appartement du XVIIIe siècle.
En parallèle, nous préparons une exposition pour le printemps consacrée aux œuvres du XXe siècle conservées au musée et pour le moment assez inédites.
Nous poursuivons également nos actions envers le public qu’il soit local, familial avec des ateliers par exemple ou plus amateurs et en recherche de propositions originales comme nos soirées « art et œnologie » ou les séances « art et relaxation » sans oublier notre engagement envers les publics empêchés comme nos actions à la Maison d’Arrêt des Femmes de Versailles.
Vous dirigez le musée Lambinet depuis 2018, quelles sont vos fonctions au quotidien ?
Je suis depuis la fin de l’année 2018 à la tête d’une équipe de 15 personnes.
Après une année, on peut déjà dire que nous avons trouvé nos marques. Mon métier consiste essentiellement à guider mes collègues, suivre les actions et créer une dynamique de groupe. J’ai trouvé en arrivant de très bons appuis comme Alice Gamblin, chargée de la régie des collections et son équipe. J’ai pu ensuite recruter Maxime Boulegroun-Ruyssen comme chargée des publics qui a très fortement contribué à dynamiser l’offre en collaboration avec Clotilde Desprès, notre chargée de la communication. Grâce à elles, nous avons gagné en audience et en public, passant par exemple de 1700 à plus de 4 000 scolaires accueillis au musée. Enfin, Charlotte Bellando a accepté ma proposition de rejoindre mon équipe afin de m’assister dans tout ce qui concerne l’aspect scientifique des collections mais aussi les partenariats. Bien que très jeune, elle a su par sa maturité et son réseau nous faire gagner un réseau particulièrement intéressant pour la valorisation de nos collections.
J’aime beaucoup l’aspect management de mes missions. La conduite du changement n’est pas toujours aisée mais j’essaie de faire évoluer le musée en respectant les actions et les procédures qui fonctionnent déjà. Le plus important est la confiance que j’essaie d’instaurer chaque jour entre eux et moi.
Quel a été votre parcours précédent ?
Diplômée de l’Ecole du Louvre, j’ai eu la chance de faire une très belle rencontre au cours d’un stage déterminant en 2005 au musée de Picardie : Mathieu Pinette y était alors le directeur. J’ai toujours en tête sa grande humanité et son humilité. Il était à la fois capable de mener de grandes expositions très rigoureuses et de prendre en charge une visite pour un groupe de scolaires avec une très grande pédagogie. Il avait lancé de véritables expositions dans un centre social d’Amiens avec vernissage et prêts d’œuvres. C’était très enrichissant !
J’ai ensuite réussi le concours d’attaché de conservation et j’ai été recruté au musée de Saint-Maur où j’ai beaucoup appris sur la vie d’un musée territorial en Ile-de-France où l’offre est riche. Avec des moyens restreints, nous avons été capables de mener de très jolies expositions sur des thèmes très variés comme l’histoire de la chaussure, l’architecture de la ville ou encore la peinture de genre.
J’ai ensuite souhaité évoluer vers plus de responsabilité et j’ai préparé le concours de conservateur. Après la formation à l’Institut National du Patrimoine, j’ai pris la tête du musée d’art et d’histoire de Meudon qui a été très intense. Là aussi, les moyens étaient limités et il fallait faire preuve de créativité mais j’avais une petite équipe très motivée et un adjoint particulièrement actif en la personne de Franck Devedjian. Je suis restée finalement assez peu longtemps à Meulon car la ville de Versailles m’a contactée en vue de passer les entretiens pour le poste de directrice du musée Lambinet à Versailles et cette nouvelle étape me comble à tous les points de vue.
A vous écouter, votre choix était clair, vous aviez choisi votre voie. Je me trompe ?
J’ai beaucoup de chance en effet. Je m’épanouis beaucoup, j’apprends chaque jour, tant au niveau des connaissances qu’humainement. Jeune, j’aimais l’histoire et la littérature. Mais je me destinais au métier d’enseignante. Et ma sœur m’a parlé de l’Ecole du Louvre. J’ai passé le concours d’entrée et j’ai eu la chance de l’avoir. Je viens du Pas de Calais et suis venue à l’âge de 17 ans à Paris afin de suivre mes études à l’Ecole du Louvre. Je n’ai plus quitté la région parisienne depuis !
C’est ainsi que dès 1999, j’ai suivi le cursus à l’Ecole du Louvre et obtenu le diplôme de 1er cycle, architecture, décor et ameublement des grandes demeures. Puis le diplôme d’études
supérieures (muséologie), spécialité conservation – option marché de l’art. En 2014, j’ai obtenu le diplôme conservateur du patrimoine spécialité musées, option XVème-XVIIIème siècle à l’Institut national du Patrimoine.
Mon travail n’est pas ma passion mais il est très intéressant ! Beaucoup de surprises, d’imprévus à gérer. Je cherche plutôt à favoriser l’expression d’autres experts (conservateurs, chercheurs…) tel que Xavier Salmon, directeur du département des arts graphiques au musée du Louvre, qui travaille sur le portrait depuis de nombreuses années et qui est une référence en ce qui concerne le portrait et le pastel au XVIIIe siècle. Nous collaborons également avec Martial Poirson, professeur à l’université, spécialiste du théâtre notamment et qui sera le commissaire de notre exposition de décembre sur la circulation des images dans les arts décoratifs puis d’une autre grande exposition à l’espace Richaud à Versailles sur Molière en 2022.
J’ai un message pour les jeunes étudiants, même si l’on vous dit que le management n’est pas gratifiant car il ne vous permet pas de laisser votre nom sur un ouvrage, c’est une mission déterminante dans la vie d’établissement et tellement riche dans une vie professionnelle.
La culture est-elle une histoire personnelle, une histoire de famille ?
J’ai trois enfants (11, 5 et 2 ans) qui me prennent beaucoup de temps. J’ai à coeur de leur faire partager avec mon mari la culture. Le Louvre, le Quai Branly, Radio France, le Théâtre…
J’ai besoin de lever le pied le week-end et en vacances. Quand on part, c’est surtout pour nous reposer, notamment dans le Sud de la France !
Précisions relatives aux photos © Ville de Versailles. Celles-ci présentent :
- M. François de Mazières, Maire de Versailles et Président de Versailles-Grand-Parc,
- Xavier Salmon, Conservateur général, directeur du département des arts graphiques au Louvre et commissaire de l’exposition actuelle du Musée Lambinet.
- Alain Schmitz, Sénateur des Yvelines.